L’autre Race of Champions ( đČđœ Rally of Nations)
Florian Barral fut l’un des premiers contributeurs de WRS dĂšs 2018 avec son Ă©popĂ©e AmĂ©ricaine (Ă lire ici), son premier rallye hors de l’hexagone. Depuis, le natif de Valberg dans les Alpes Maritimes qui hĂ©sitait entre le baquet de droite et celui de gauche, a laissĂ© le volant de sa 106 N2 pour se consacrer Ă son rĂŽle de copilote et on peut dire que cela lui rĂ©ussi. DĂ©jĂ 160 rallyes au compteur, en WRC, ERC, en ARA (American Rally Association), en Belgique et bien sĂ»r en France. La carte de visite de ce bientĂŽt trentenaire en ferait envier plus d’un mais ce n’est que le dĂ©but:

» Je ne pensais pas qu’un jour je dĂ©ciderais de faire du rallye mon mĂ©tier. Au dĂ©but, on commence tous par passion, pour expĂ©rimenter la course de l’intĂ©rieur sans objectif prĂ©cis. J’alternais entre le rĂŽle de copilote et celui de pilote de ma 106 N2. Puis les opportunitĂ©s, les rencontres m’ont petit Ă petit amenĂ© Ă privilĂ©gier ce rĂŽle de copilote quand j’ai cotĂŽyĂ© le haut niveau. Il faut dire aussi qu’en Ă©tant saisonnier, les budgets pour rouler devenaient de plus en plus compliquĂ©s mais c’est aussi ce mode de vie qui me laissait un peu plus de souplesse pour accepter des propositions. Mon but ultime reste un jour de remporter des victoires Ă l’international, des championnats et bien sur intĂ©grer un team officiel mais ce n’est pas la seule chose qui m’anime. Voyager, rencontrer de nouvelles personnes, d’autres cultures a tout autant d’importance, le rallye est finalement un moyen plus qu’une finalitĂ©. C’est pourquoi j’essaye aussi de me dĂ©marquer en copilotant en anglais. Cela ouvre d’autres portes bien plus larges. »
C’est justement ce qui l’a amenĂ© en 2022 Ă rouler aux cĂŽtĂ©s du Canadien JoĂ«l Levac. Alors qu’il effectuait sa premiĂšre saison avec l’amĂ©ricano-polonais Patrick Gruszka dans une rare Mitsubishi Mirage RS, le jeune copilote français commence Ă se faire un petit nom et sa vision europĂšenne de la discipline intĂšresse fortement JoĂ«l, toujours en recherche d’Ă©volution. Une premiĂšre collaboration fructueuse puisqu’ils remportent le Rallye DĂ©fi Petite Nation Ă bord lĂ aussi, d’une rare Mini JCW WRC ex-officielle (chassis #21), unique WRC Ă Ă©voluer sur le continent amĂ©ricain. Deux aprĂšs, les voilĂ de nouveau rĂ©unis pour une tout autre aventure: le Rally of Nations.

Ce rallye, bĂąti sur l’ancienne et peut ĂȘtre de nouveau future manche mexicaine du WRC, a tentĂ© de survivre en proposant un concept atypique. En plus d’un classement gĂ©nĂ©ral par Ă©quipage classique, il y un classement par nation basĂ© sur des points marquĂ©s pour chaque spĂ©ciale et dĂ©pendant de votre voiture:
» On a appris le fonctionnement du classement des nations la veille par bulletin. L’organisateur a invitĂ© ou trouvĂ© des solutions pour disposer de nombreuses tĂȘtes d’affiche comme Mads Ostberg, Dennis RĂ„dström, Nil Solans, Max McRae, Harri RovanperĂ€ ou encore Didier Auriol et Julien Ingrassia. Selon la voiture, une BoP (balance des performances) est appliquĂ©e, une sorte de coefficient qu’on multiplie au temps rĂ©alisĂ© et cela donne un nombre de point par spĂ©ciale. L’Ă©quipe qui a le plus de points remporte le classement des nations. C’est un challenge supplĂ©mentaire sympa mĂȘme si forcĂ©ment la diffĂ©rence de performance entre une Skoda Fabia R5 et par exemple notre Toyota Yaris GR d’origine est abyssale. Le concept a le mĂ©rite d’exister. Nous Ă©tions intĂ©grĂ©s Ă l’Ă©quipe CanAm (pour Canada-AmĂ©rique) avec le duo Conner Martell et son copilote Alessandro Gelsomino. »

» Je n’ai pas Ă©tĂ© trop surpris au dĂ©part du point de vue organisation: c’est la mĂȘme Ă©quipe qui s’occupait de l’Ă©preuve en WRC donc les standards Ă©taient Ă©levĂ©s et ils continuaient d’appliquer ces mĂ©thodes. Beaucoup de spĂ©ciales ont Ă©tĂ© reprises, les timings d’assistance ou les flexi-service Ă©taient similaires, tout comme le roadbook. Une super expĂ©rience pour moi pour le futur forcĂ©ment. Nous avons eu pas mal d’activitĂ©s en amont de la course pour rencontrer les autres Ă©quipages ce qui Ă©tait plutĂŽt sympa. »


CĂŽtĂ© vĂ©hicule en revanche ce fut un sacrĂ© dĂ©fi. Le team mĂ©xicain VP Garage qui faisait rouler notre Ă©quipage et entre autre la Skoda Fabia R5 de Mads Ostberg, a eu Ă peine 1 semaine pour transformer 8 Toyota Yaris GR de route en voitures capable de rallier l’arrivĂ©e d’un rallye terre exigeant et conformes en termes de sĂ©curitĂ©:
« Ce rallye a servit un peu de vitrine pour un projet plus global qui vise Ă organiser une coupe avec ces voitures, un peu Ă l’image de la Toyota Yaris Iberian Cup gĂ©rĂ©e par l’Ă©quipe espagnole MSi depuis dĂ©jĂ quelques saisons. Ici le timing Ă©tait peut ĂȘtre un peu trop serrĂ© mais l’Ă©quipe a rĂ©ussi un vĂ©ritable exploit. D’autres Ă©quipes comme VSC (Vermont Sport Car, l’Ă©quipe qui dĂ©veloppe et exploite les Subaru WRX officielles en ARA) ont aidĂ© pour que cela soit possible. Les Yaris GR Ă©taient strictement d’origine avec simplement les Ă©lements de sĂ©curitĂ© obligatoires comme l’arceau, des baquets GT2i et leurs harnais, des extincteurs, des amortisseurs 3 voies, protĂ©ges carter ou encore un embrayage renforcĂ© qui nous aura plus causĂ© des soucis qu’autre chose. L’intĂ©rieur de l’habitacle n’avait pas bougĂ©, mĂȘme le volant Ă©tait d’origine ! Impossible donc d’effectuer le moindre mĂštre d’essai, dĂ©couverte au shakedown. »


Il faudra donc rouler intelligement sur ce terrain qui heureusement ne se dĂ©grade pas trop. C’est lĂ que l’expĂ©rience de Florian sur diffĂ©rents types d’Ă©preuves et notamment en WRC aprĂšs le passage des Rally1, aura toute son importance. Mais pas seulement:
» Nous n’avons jamais eu de start list pour le shakedown ni pour la journĂ©e du samedi d’ailleurs. Retour Ă l’ancienne oĂč il faut estimer notre heure selon le dĂ©part de l’Ă©tape. Le shakedown s’est bien passĂ© hormis l’ouverture du capot au second passage, heureusement sans consĂ©quences. La super spĂ©ciale dans la ville ancienne de Guanajuato reste un monument, WRC ou pas, tout comme la cĂ©rĂ©monie de dĂ©part en prĂ©ambule. Nous avons Ă©tĂ© escortĂ© depuis le pĂ©age par la police car il y avait un monde fou. Pour le premier passage nous avons vraiment assurĂ© le coup car c’est trĂ©s spĂ©cifique sur ces pavĂ©s, notamment dĂšs le dĂ©part dans le tunnel. Malheureusement au second passage on cale mais rien de grave comparĂ© Ă Auriol et Giraudet qui doivent dĂ©jĂ en rester lĂ . »


» La premiĂšre vraie spĂ©ciale Ă©tait donc la 3, celle d’Ortega. On rattrape Annia Cilloniz, l’une des laurĂ©ates de l’opĂ©ration FIA Rally Star en 2023 et on reste dans sa poussiĂšre. On fini par perdre les freins et il a donc fallu gĂ©rer avant de pouvoir purger sur la liaison. Dans le second passage, nous faisons une erreur et on tape un rocher, la voiture roule en crabe. On dĂ©monte la piĂšce dĂ©fectueuse mais nous n’avons pas celle de remplacement donc la fin de boucle et de journĂ©e a Ă©tĂ© compliquĂ©e. On fait trĂšs attention aux guĂšs et aux cordes car dans cette configuration « origine + », la voiture encaisse beaucoup. L’embrayage renforcĂ© nous oblige Ă jouer sur les modes de fonctionnement pour pouvoir s’Ă©lancer car ça met la voiture en dĂ©faut. Et pour conclure, nous n’avons jamais passĂ© la 5 car la boite tire trĂšs long. Mais on s’amuse ! »



DerniĂšre journĂ©e de course pour le duo franco-canadien alors 11Ăšme au gĂ©nĂ©ral et 3Ăšme de la catĂ©gorie. Mais dĂšs l’entame, il Ă©tait dit que rien ne serait facile:
» Dans l’ES9, la premiĂšre du jour, on casse l’amortisseur ARD sur un tout petit choc. On dĂ©cide de poursuivre comme ça et de passer la ligne. A l’arrivĂ©e on constate les dĂ©gĂąts et on sait que la roue va finir par Ă©clater. Elle rend son dernier souffle sur la liaison et on doit la changer juste avant le dĂ©part, ce qui nous fera pointer 1min en retard. Heureusement, la derniĂšre roue a tenu les 21,8km suivants mais on doit jouer stratĂ©gique en changeant et intervertissant les roues crevĂ©es et en Ă©tat pour les liaisons et les spĂ©ciales jusqu’Ă pouvoir rentrer au parc. A l’assistance, l’Ă©quipe n’a pas eu le temps de faire la gĂ©omĂ©trie et on termine donc le rallye avec une auto trĂšs compliquĂ©e Ă conduire. Mais JoĂ«l a fait le boulot et nous franchissons la ligne d’arrivĂ©e au 12Ăšme rang et en 4Ăšme place de la catĂ©gorie. Une sacrĂ©e aventure, en voiture presque de sĂ©rie, dans un pays que je dĂ©couvrais et sur des routes magnifiques. En espĂ©rant voir le retour d’une manche sud-amĂ©ricaine trĂšs vite dans le calendrier du WRC. »



Pour conclure cette Ă©popĂ©e mĂ©xicaine, je vous propose de visionner cette vidĂ©o trĂšs intĂ©ressante de l’Ă©quipage Martell / Gelsomino engagĂ©s sur la mĂȘme auto et oĂč on peut apercevoir Ă plusieurs reprises Florian en plein travail.

Nous souhaitons une belle saison 2024 Ă Florian et notamment dĂšs demain pour l’ouverture du championnat de France Terre du cĂŽtĂ© de Capdenac aux cĂŽtĂ©s de Florent Todeschini.
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Sources:
- Profils: Florian (Pilote) / Florian (Copilote)
- Photos: Vermont Sport Cars / eWRC
- Résultats: eWRC
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hiringa25 Tout afficher
Câest en feuilletant un vieux magazine de lâannĂ©e 1994, que mon attrait pour le rallye a commencĂ©. Il aura pourtant fallu attendre le Monte Carlo 2000 pour que jâaperçoive en vrai ces autos et ces pilotes qui me faisaient tant rĂȘver. Depuis, cette discipline hors normes Ă guider ma vie, sous diffĂ©rentes formes, et jâai dĂ©sormais la chance dây travailler au quotidien comme coordinateur sportif et copilote.
